Le 18 octobre, ce fut au tour du sextet du trompettiste américain Jeremy Pelt d’irradier la scène de Chorus avec son jazz postbop. Goguenard, rieur, le regard attentif et bienveillant, c’est un Jeremy Pelt en superforme qui a présenté son dernier album “Armor of Pride »*, un succès salué notamment par le magazine Down Beat.
Réunissant la fine crème des musiciens actuels, le Black Art Jazz Collective a pour but de promouvoir la reconnaissance des cultures afro-américaines. Ce collectif, cofondé par les musiciens Johnathan Blake, Wayne Escoffery et Jeremy Pelt, entend célébrer la « Black Culture » à travers le jazz, dans tout ce qu’elle a de positif et rayonnant. On adhère car le combat est loin d’être terminé…
Après une tournée de quatre jours à Athènes et trois à Istanbul, le combo s’arrêtait à Lausanne. En son sein, deux « petits nouveaux » : Corcoran Holt à la basse et Mark Whitfield Jr. à la batterie, en plus du « noyau dur » : Wayne Escoffery (ts), James Burton III (tb), Xavier Davis (p) et évidemment Jeremy Pelt (tp). Tous sont compositeurs également. Les morceaux choisis passent donc de main en main, et font alterner groove urbain (« The Spin Doctor », composé par Burton) et ballade délicate (« Awuraa Amma », signé Pelt, en hommage à sa fille). Le propos est généreux, le plaisir communicatif, si bien que le public répond présent devant tant de talent et de professionnalisme.
Dès le premier morceau, « Miller Time », écrit en hommage au pianiste trop tôt disparu Mulgrew Miller, la trompette de Jeremy Pelt se fait flamboyante, tonique, mais toujours aux harmonies subtiles, à l’image de ses maîtres Woody Shaw et Freddie Hubbard. La section rythmique, toujours à l’écoute, est emmenée par Xavier Davis au piano, étonnant de fluidité swinguante, par Corcoran Holt, aux solides lignes de basse, et par Mark Whitfield Jr à la batterie, au drumming implacable, le sourire permanent aux lèvres.
Et quels souffleurs ! Wayne Escoffery est à 44 ans un des piliers du saxophone ténor contemporain. Son phrasé est divinement tortueux, d’une puissance à la fois grave et maîtrisée. Quant à James Burton III, son jeu au trombone, même dans les parties les plus échevelées, reste fluide, sans fioritures inutiles, le timbre est gracieux. Et élégant. C’est d’ailleurs le mot qui résume le mieux cette soirée.
Gabriel Décoppet
* Le CD vient de paraître chez HighNote